Prestige N 81, Février 2000
Un premier ministre si méconnu
La veille de son anniversaire le 20 décembre 1999, à son sanctuaire de Doha-Aramoun, dont rares ont pu pousser la porte, nous avons rendez-vous avec Salim Hoss. Après l’avoir rencontré à son domicile de Aicha Bakkar à Beyrouth, pour un premier entretien, deux jours après, le Premier ministre nous invite à sa villa de Doha qu’il a construite «pierre par pierre, une partie de moi-même». C’est cette maison qui a abrité son bonheur, mais dans le jardin d’hiver qui accueillait de joyeuses soirées, les cages d’osier sont désormais vides d’oiseaux. Affable, accueillant, le Premier ministre tranche avec son image d’homme discret, taciturne, qui tant de fois tente de redresser la barre, d’empêcher le pays d’aller à la dérive. Qui refuse à ce jour de laisser le Liban couler. Intransigeant, intraitable, le Premier ministre se révèle pour la première fois père de famille, époux aimant et ému.. au souvenir de sa femme, Leyla Pharaon, dont les photos sont disposées dans toutes les pièces.
© Prestige / J.C. Bejjani
Le Président du Conseil «at home», pose pour notre photographe. En arrière-plan, son paysage favori, de la terrasse de sa demeure de Doha, avec au loin, nous indique-t-il la vallée de Damour.
«J’ai pour ma mère beaucoup d’admiration, Elle se privait souvent pour nous»
Vous n’aviez que sept mois lorsque votre père est décédé, laissant un vide au sein de votre famille. Comment avez-vous vécu cette absence? C’est ma mère qui a comblé le vide, elle était à la fois le père et la mère. Elle s’est toujours dévouée pour ses enfants.
Comment décririez-vous votre relation avec votre mère? Extrêmement affectueuse. J’avais pour elle beaucoup d’admiration. Il lui arrivait souvent de se priver pour nous.
Que vous a-t-elle appris de fondamental? La noblesse de l’âme, l’amour du prochain, et surtout le respect de la famille.
Une autre femme a joué un rôle non moins important dans votre vie, votre épouse Leyla née Pharaon, de confession différente de la vôtre, alors que l’on sait que vous êtes très attaché à votre confession. Comment votre couple a-t-il négocié cette différence? Je vis et ai toujours vécu à l’écart de tout confessionnalisme. Il n’y a d’ailleurs jamais eu de conflit entre ma femme et moi sur ce plan. Lorsqu’elle sentit que sa fin était proche, elle m’a exprimé son souhait d’être ensevelie au cimetière musulman afin de pouvoir reposer un jour à mes côtés.
C’est ainsi qu’elle s’est convertie à l’islam.
Comment avez-vous connu votre épouse? Sur le lieu de travail. A la Chambre de Commerce où elle était engagée comme secrétaire.
Salim Hoss est grand-père, êtes-vous proche de votre petit-fils Salim? Salim est un adorable petit garçon de dix ans. Notre relation est très particulière, très affectueuse.
Vos souvenirs de Beyrouth? Mes souvenirs de Beyrouth sont très nombreux parce que j’y ai passé ma jeunesse, d’abord à Zokak el Blatt, puis Hawd el Wilayeh à Mousseitbeh, puis à Furn el Chebback chez les parents de ma femme, ensuite, j’ai voyagé au Koweit deux ans en tant que conseiller financier au Fonds koweitien pour le développement.
Entre-temps, j’ai acheté un terrain à Doha … Mais les combats des rues, le siège israélien, l’angoisse des Beyrouthins traqués, les pires moments de la capitale, je les ai tous vécus.
Où avez–vous effectué vos études scolaires? D’abord aux Makassed, puis j’ai voulu changer d’école, me transférer à l’IC, afin d’apprendre l’anglais et améliorer mon niveau … Mais ma mère m’a dit: «Mais comment veux-tu? C’est trop cher pour nous! D’où veux-tu que je me procure l’argent de ta scolarité?» J’ai pu avoir gain de cause. Ma cousine (qui allait devenir par la suite l’épouse d’Osman el Dana) a payé ma scolarité à l’IC. Ma grand-mère a ensuite pris la relève durant quatre ans. Une fois étudiant universitaire, j’ai pu travailler sur le campus même.
Les professeurs me payaient une livre et quart par heure pour corriger des épreuves. Et puis je recevais des bourses en raison de mes distinctions. J’ai pu donc économiser et payer mes études en Economie et Gestion d’affaires.
Après ma maîtrise, j’ai obtenu une bourse de la Rockfeller Foundation, et j’ai pu poursuivre mes études de doctorat aux Etats-Unis. Tous frais personnels compris même ceux de ma famille … car j’étais déjà marié et père d’un enfant. Je me suis en fait marié après mon BA, j’ai ensuite travaillé, à la Chambre de Commerce puis en qualité d‘assistant lecturer à l’AUB. J’ai obtenu ma maîtrise tout en donnant des cours à l’université. Ma femme m’a aidé. C’est elle qui s’est chargée aussi de dactylographier ma thèse de doctorat. Ma femme me disait sur le ton de la plaisanterie : «Ne devrais-tu pas me citer dans la préface, en reconnaissance de services rendus?»
© Archives Salim Hoss
Elève des Makassed, il voulut changer d’école pour améliorer son niveau. Sa mère lui dit: «Mais comment veux-tu? C’est trop cher pour nous!» Il eut gain de cause…Jeune professeur à l’AUB, il comptera nombreux étudiants libanais et arabes, devenus plus tard ministres et hommes d’Etat.
Votre femme est en effet présente dans certains de vos ouvrages, en arabe et enanglais. Vous voyez ses photos, dans toutes les pièces, elle m’a encouragé, toujours. Dans le dernier chapitre de Peace & Agony, je la cite et je m’adresse à elle.
© Archives Salim Hoss
C’est sa femme Leyla Pharaon qui a fait de leur demeure de Doha un havre de paix, un petit musée qu’elle aménagera avec goût dans un style arabe.
Vous avez une affection particulière pour votre maison de Doha …Parce que ma femme en a fait un petit musée. Elle a aménagé toutes les pièces en style décoratif arabe. En guise de salle à manger, elle a installé la traditionnelle tabliyeh, remplacé les glaces des miroirs par de l’onyx … La maison est restée inchangée depuis. A partir de ses arcades, nous avons une vue superbe sur la vallée de Damour et la mer. Cette maison a pour moi une grande valeur sentimentale. C’est une partie de moi-même, je l’ai construite pierre par pierre. Nous l’avions inaugurée fin 1968. Les travaux ont commencé alors que je me trouvais au Koweit. J’y suis resté deux ans. J’ai beaucoup voyagé. J’étais conseiller du Fonds Monétaire arabe dont le Liban est membre. Je me rendais à son siège d’Abu Dhabi, mais j’étais installé au Liban. Puis le FMA a créé une commission d’experts arabes, pour l’étude du Dinar, une monnaie unifiée pour les pays arabes. J’ai présidé cette commission.
A son tour la Ligue a fondé un comité d’experts pour étudier la restructuration des institutions et organisations arabes de travail en commun, j’ai également présidé ce comité.
J’ai aussi présidé le BAII que se partagent des banques arabes et françaises. Je me rendais donc souvent à Paris. Et lorsque je suis devenu président de la Commission de contrôle à la Banque centrale, j’ai obtenu un prêt pour poursuivre la construction de la maison.
Comment avez-vous fait la connaissance du Président Elias Sarkis, l’homme qui vous a introduit à la politique? Après le Koweit, je suis revenu enseigner une année à l’AUB.
Suite au krach de la Banque Intra, une commission de contrôle des Banques a été créée par décret et l’on m’a proposé de la présider. J’ai abandonné mon poste à l’AUB. J’ai ainsi rencontré le président Sarkis.
«Tout est sujet de débat sauf … mes convictions, mes principes qui restent inébranlables!»
Plus précisément en juin 1967, le jour où j’étais allé prêter serment chez le président Charles Hélou au palais présidentiel de Sin el Fil, jour qui coïncidait avec le début de la guerre des six jours arabo-israélienne. J’étais accompagné de Béchara Francis et Vlado Khlat. L’officier de service écoutait les nouvelles alarmantes à la radio. Ce fut donc une cérémonie vite expédiée en raison de la situation dramatique. Le président de la République était resté debout. Le président Elias Sarkis, à l’époque attaché au Palais présidentiel me faisait répéter après lui les formules d’usage. Je l’ai donc connu avant qu’il ne devienne gouverneur de la Banque Centrale, je suis en fait entré à la Banque Centrale un mois avant qu’il n’y soit nommé.
Une solide amitié s’est installée entre nous deux. J’ai fondé par la suite la Banque Nationale pour le Développement… une sorte de joint-venture entre le gouvernement et le secteur bancaire. L’Association des Banques avait donné son consentement à une condition: que j’en sois le premier président.
J’ai donc quitté mon poste de président de la Commission. Nos bureaux se situaient à Tabaris et Elias Sarkis m’appelait quasi tous les jours pour discuter d’économie et de politique. En 1976, Elias Sarkis fut élu président et il tenait à me voir tous les jours chez lui à Mar Takla, je traversais donc tous les jours la ligne de démarcation, le général Michel Nassif me rejoignait au barrage de l ‘Hôtel-Dieu pour m’escorter chez le président.
Elias Sarkis m’avait demandé d’élaborer un projet de développement et de reconstruction, et je lui en ai tracé les lignes principales. Il me dit un jour: «Je voudrais te confier un portefeuille, lequel voudrais-tu?» «Je ne veux pas de portefeuille, mais je souhaiterais fonder un Conseil pour le Développement et la Reconstruction, projet qui deviendra réalité, et si je devais être membre du Cabinet, je serais ministre d’Etat au Développement et à la Reconstruction.»Je n’occupais aucune fonction officielle et pourtant le président Sarkis insista que je l’accompagne lors des pourparlers du Caire pour la création des Forces de frappe arabes. A son retour, il essaya sans succès de créer sous la présidence de Takieddine Solh un gouvernement de factions, houkoumat faaliyyat, qui rassemblerait toutes les parties opposées dans le conflit, toutes les milices en présence. Après maintes tentatives vaines, il se tourna vers moi. Je suis resté Premier ministre quatre ans durant son mandat.
Voilà une histoire qui m’a beaucoup marqué: à une certaine période de la guerre, les miliciens avaient coutume d’envahir les rues et d’y installer des barrages de la manière la plus imprévisible, les citoyens comprenaient qu’ils devaient tout de suite rentrer chez eux.
Un jour que je me trouvais au siège de la Banque Nationale à Tabaris, le président Sarkis m’appela et me convoqua sur- le-champ.
L’affaire semblait urgente, je le retrouvai dans le hall de la Banque Centrale et lui demandai ce qui se passait: il me dit que l’on venait d’assassiner William Hawi, leader phalangiste, à Tall-el Zaatar. il craignait d’éventuelles représailles et avait eu peur pour ma vie. Je lui dis: «Je te suis reconnaissant de m’avoir sorti de là, mais mes collaborateurs sont encore à la banque!» On dépêcha alors à leur intention une escorte de forces de sécurité.
© Prestige / J.C. Bejjani
Lorsque vous collaboriez au sein du pouvoir, partagiez-vous les mêmes idées? Non, très souvent nos idées divergeaient mais quoi qu’il ait été dit sur le président Sarkis,
son patriotisme et son intégrité sont indiscutables. Mais très souvent pendant une guerre, un homme est soumis à des pressions extrêmement fortes qui dévient ses décisions.
Ahmad Tabbarah et Fouad Saniora comptaient parmi vos élèves. Avez-vous gardé des relations avec quelques-uns d‘entre eux? L’ancien Premier ministre libyen Omar
el Montasser, ministre de l’Education actuel était aussi mon élève. J’ai gardé des relations avec nombreux d’entre eux. Partout dans les pays arabes, je retrouve des élèves, au Liban
aussi dont certains sont devenus ministres … Fouad Saniora était un élève brillant qui travaillait à la Citybank. Je lui faisais confiance, je l’ai nommé contrôleur à la Banque Centrale.
Les temps changent, certains ont tourné le dos, oublié... Comment réagissez-vous? Pardonnez-vous à vos ennemis? Ou êtes-vous plutôt rancunier? Au contraire! A mes yeux, la plus belle des vertus est le pardon. Je suis un homme qui croit d’abord aux relations humaines, et je rejette la rancune.
Vous parlez de deux méthodes. En quoi votre méthode et celle de Hariri divergent-elles? Je laisse aux gens le soin d’en juger. Hariri et moi sommes restés tous les deux assez longtemps Premiers ministres pour cela.
En 1996, vous étiez du côté de l‘opposition, en 2000, vous êtes au pouvoir. Portez-vous le même regard sur l’opposition? Ça ne change absolument rien. Même si je suis aujourd’hui de l’autre côté de la barrière, je soutiens la présence de l’opposition.
«Amitié et respect me liaient au président Sarkis même si nous n’étions pas toujours d’accord»
Vous êtes l‘auteur de plusieurs ouvrages. Vous avez rédigé des mémoires, des étapes politiques de l’histoire. Votre objectif est-il purement biographique? J’aime écrire et je voulais me diplômer en lettres arabes. Mais ma famille s’est indignée: «Tu n’as quand même pas l’intention de faire toutes ses études pour finir simple instituteur dans une école? J’ai donc choisi une autre voie, celle de l’Economie et du Business. Mais j’ai toujours aimé écrire … Et puis je souhaite inscrire dans l’histoire cette longue expérience riche en événements. J’en profite pour évaluer mes prises de positions, pratiquer l’autocritique.
Et vos relations avec Yasser Arafat? Etiez-vous amis? Non, mais nous avons souvent traité l’un avec l’autre, lors du mandat Sarkis. Je décrirais cette relation de mitigée. Aujourd’hui nous ne sommes plus en contact.
Vous étiez un opposant à Béchir Gemayel, quand celui–ci fut élu président, Saëb Salam changea d’attitude, pas vous? Je m’oppose à tout ce qui se rapporte à la milice. Je ne peux exprimer mon soutien à une personne qui a pris part active à la guerre et encore moins qu’on lui confie un poste à responsabilités … Il n’y avait même pas eu de consensus! Comment accepter qu’une faction accède au pouvoir sans consensus, cela allait à l’encontre des intérêts du pays et comportait beaucoup de risques. Je n’étais pas convaincu par Béchir… et s’il avait échappé au tragique attentat, je me serais rangé du côté de l’opposition. C’est mon droit.
© Archives Salim Hoss
Bien que n’occupant aucune fonction officielle, Elias Sarkis insista à ce que Hoss l’accompagne à la conférence du Caire, et lorsque Takieddine Solh échoua à former «un gouvernement de factions», c’est Hoss qui fut propulsé à la demande expresse du président au poste numéro trois de l’Etat.
Vous avez échappé vous-même à un attentat. Que s‘était-il passé? En 1984, j’étais ministre de l’Education, des Affaires sociales et du Travail dans le Cabinet Rachid Karamé (assassiné en 1987). Or la tradition du Eid veut que le Premier ministre accompagne le mufti, pour la prière à la mosquée. Devant se rendre à Tripoli, Rachid Karamé m’a confié cette mission. D’habitude, je refuse l’escorte de motards, et durant mes quatre ans sous le mandat Sarkis, ma seule escorte fut une jeep. Mais cette fois-ci, Karamé m’a dépêché deux motards, je n’ai voulu vexer personne et je les ai acceptés …
pour leur malheur. A 200 mètres de la maison du mufti à Raouché, une voiture piégée explosa, le militaire au volant de ma voiture, les deux motards et une femme qui prenait son café sur sa terrasse, ont été tués.
Mon garde Wafic blessé. En raison du choc et de la fumée, j’ai eu un accès d’asthme et je commençai à étouffer, Pour ma chance, la portière s’ouvrit, je traversai la rue. J’interpelai un enfant qui courait, lui dit mon nom. Lui s’appelait Hilal Assi et travaillait chez un traiteur du voisinage. Le jeune garçon revint sur ses pas pour me porter secours, et tenta de héler une auto qui passait en faisant de grands signes. On me conduisit à l’hôpital et j’y séjournai cinq jours.
«II était inconcevable que je sois sur la même liste que Rafik Hariri, Nos visions divergent…»
Vous avez de fidèles compagnons de route qui ne vous ont jamais quitté. Ces compagnons loyaux m’ont accompagné le long de mon parcours, je les traite comme des frères. »
Quelle est à vos yeux votre meilleure qualité? Ce n’est pas à moi d’en juger ou d’en parler à la manière du fameux Hajjaj Bin Youssef…
Quelle personnalité politique ou historique vous a le plus marqué? Tout d’abord, un homme remarquable, Gamal Abdel Nasser.
«J’admire Rachid Karamé, un homme d’Etat de première classe, assurément»
J’admire aussi les protagonistes de l’Indépendance du Liban, Riad Solh et Béchara Khoury. J’aimais le charisme, le courage de Nasser, sa sérénité. Je ne l’ai pourtant jamais rencontré. J’admire aussi Rachid Karamé, nous avons cohabité trois ans au pouvoir, j’ai bien vu sa manière de réagir, ses positions. Je connais sa valeur, ses qualités, c’était un homme d’Etat de première classe.
Qui d’autre des hommes politiques vous a laissé bonne impression? Tous (rires).
Avec qui êtes-vous resté en relation après votre exercice? Ils sont peu nombreux et se sont éloignés. C’est normal, chacun a emprunté sa propre voie … Peu m’ont accompagné.
Pensez–vous avoir un fils adoptif politique » dont la pensée soit une continuation de la vôtre? Plus d’un, en réalité …
Des hommes issus de toutes les régions du Liban. C’est le National Action Forum, créé en 1987, par un groupe d’intellectuels, universitaires ou professeurs d’universités, présidé aujourd’hui par Dr Issam Sleiman. Les membres du Forum sont actifs, ils organisent des ateliers de travail, effectuent des études …
Il s’agit d’un groupe assez politisé, sa pensée, son orientation sont politiques mais qui n’est pas encore entré dans l’arène politique.
© Archives Salim Hoss
On vous doit le concept du Conseil du Développement et de la Reconstruction. Vous aviez ce projet à cœur, et vous l‘avez créé, quels étaient ses objectifs? Le président Elias Sarkis m’avait demandé un plan de développement, son schéma directeur, et je me suis attelé à la tâche. Nous sortions à peine d’une guerre ou plutôt croyions sortir d’une guerre et nous avons pris des décisions en conséquence, comme si la guerre était terminée. Les pays arabes ont créé une force de frappe, ont formé un comité quadripartite pour veiller à la bonne exécution de l’accord du Caire et nous ont promis une aide au développement et à la reconstruction. Tout cela indiquait la fin de la guerre. II était tout naturel d’amorcer le projet et lancer l’opération de Développement et de Reconstruction. Mais un bon développement exige une administration saine, or celle-ci était disloquée, stérile.
Et il fallait des années et un travail de longue haleine pour réaliser une réforme administrative. Justement, ce projet nécessitait des compétences affranchies de toute bureaucratie dont les ministères ne pouvaient se débarrasser alors, empêtrés qu’ils étaient dans une législation obsolète. On a donc pensé au CDR à la manière d’un îlot au sein de cette administration. On en choisirait les éléments les plus compétents et on leur assurerait une meilleure rétribution, on les libérerait de la routine administrative et on leur donnerait de nouvelles prérogatives, ainsi on aurait contourné les écueils des administrations de l’Etat.
© Archives Salim Hoss
«Ma fille Wadad et mon petit-fils Salim sont toute ma vie, tout ce qui me reste»
Pratiquez-vous un hobby à l’écart des soucis de l’économie? J’aime la marche et la natation … Je pratiquais un sport de concentration, le ping-pong, vous avez d’ailleurs remarqué la table au rez-de-chaussée. Et puis je me délasse en faisant de la marche dans le jardin ici, et dans mon quartier à Beyrouth.
Vous avez aussi une âme de mélomane et vous affectionnez la musique orientale, pour quel chanteur vont vos préférences? Mohammed Abdel Wahab, Oum Koulsoum et Fayrouz tout particulièrement avec qui nous entretenons des relations d’amitié. Enfant, ma fille adorait Fayrouz. Sa mère s’est rendue un jour chez la chanteuse. Elle a tout simplement frappé à sa porte et lui a dit: «Ma fille est une fan passionnée, elle voulait vous connaître … » Dès lors, une relation d’amitié s’est tissée et elle se poursuit aujourd’hui. Quant à Abdel Wahab, je l’ai rencontré une seule fois dans le lobby d’un hôtel à Paris. J’ai la collection de toutes ses œuvres, et aussi du classique: Beethoven, Tchaikovski et Mozart … qui sont mes compositeurs préférés.
Vous êtes très attaché à votre fille Wadad. Je n’ai plus qu’elle … elle est toute ma vie.
Propos recueillis par MARCELLE NADIM