Prestige Numéro 298, Oct-Nov. 2019
Grand amoureux de sa patrie et de sa famille, Me Antoine Klimos a toujours été fidèle à son amour et à ses convictions. Rodé au cabinet du Amid Raymond Eddé et armé de courage et de détermination, il s’attache à appliquer ses principes. Il prône la défense des libertés publiques et des droits de l’homme. Des étapes cruciales ont jalonné sa carrière juridique brillante, notamment durant son mandat de bâtonnier de l’Ordre des avocats et à la tête de la Ligue maronite. Confidences de Me Antoine Klimos, le temps d’une rencontre dans les bureaux de Prestige.
Votre carrière juridique est brillante. Pourquoi avez-vous choisi de faire des études de droit?
C’est au stade scolaire, au Collège de La Sagesse, que j’ai choisi de faire des études de droit. Notre voisin était avocat spécialisé en droit pénal, et j’étais le plus heureux des hommes chaque fois qu’il m’emmenait assister à ses plaidoiries. J’ai fait mes études de droit à l’USJ et obtenu deux licences en droit libanais et en droit français. En 3e année, j’ai été élu secrétaire général de l’Amicale des étudiants en droit. C’est là que j’ai connu, en 1968, le Amid Raymond Eddé. Nous étions, mes collègues étudiants et moi, actifs en faveur de la machine électorale du Amid qui appelait au patriotisme et à la vraie démocratie. Ma relation avec lui s’est poursuivie lorsqu’il m’a demandé d’intégrer son cabinet en tant qu’avocat stagiaire.
Vous avez fait votre stage au bureau du Amid Raymond Eddé. Quels sont les principes du leader qui vous ont le plus marqué?
Je garde de précieux souvenirs de cette période, et surtout des principes du Amid qui sont toujours ancrés dans mon esprit. Raymond Eddé avait le sens de la perfection, de l’idéalisme et de la logique juridique. Il a décliné tous les postes, pour ne pas être engagé envers un parti ou un pays étranger. Il n’a jamais accepté de créer un parti politique, qui vise la conquête du pouvoir en premier. Il a refusé d’être président de la République au détriment de sa patrie. Son action était d’envergure nationale plutôt que politique.
Qui vous a donné le goût de la chose publique?
J’ai découvert le goût de la chose publique tout d’abord à La Sagesse. J’ai été imprégné de l’ambiance «libanaise» qui régnait au Collège et qui m’a profondément marqué sur les plans intellectuel et politique. En ce temps-là, nulle place n’était accordée au confessionnalisme ou sectarisme. J’étais très actif tant au niveau sportif que politique. Le goût de la chose publique s’est par la suite consolidé avec le Amid Raymond Eddé qui me disait: «La chose publique est sacrée. Méfiez-vous de la spoliation financière, sexuelle et morale. Elle vous dépouillera et vous minera, et vous serez alors une cible facile».
Votre épouse Sonia est également avocate. Quels sont les avantages d’un couple uni par une même formation?
J’ai connu Sonia, née Féghali, avant qu’elle n’intègre mon cabinet d’avocat. Je l’ai rencontrée chez des amis, alors qu’elle était étudiante en droit. Et ce fut le coup de foudre… Je lui ai et je ne cesse de lui avouer qu’elle se mariait «avec un cœur vierge». Notre formation juridique commune l’a aidée à mieux comprendre les difficultés de la profession, ayant elle-même grandi dans une famille imprégnée de la chose publique. Sonia m’inspirait plein de solutions aux litiges. Elle est ma compagne de vie.
Encourageriez-vous vos enfants à suivre une carrière juridique?
Je n’ai jamais interféré dans le choix de la carrière de mes enfants. Mon premier conseil a été de distinguer entre l’homme ambitieux et l’arriviste. Le premier fait tous ses efforts pour réussir dans la vie, alors que l’arriviste se permet de tout exploiter pour arriver à ses fins. Je leur dis toujours que l’avenir n’appartient pas à celui qui réussit, mais à celui qui excelle.
L’aîné Elie, détenteur d’un Master en diplomatie et négociations stratégiques et diplômé de la Sorbonne, a choisi d’être avocat. Il est marié avec la charmante Dr Céline Nohra et m’a offert un précieux cadeau, ma petite-fille Chloé qui a changé toute l’ambiance de la famille. De son côté, Karl, toujours célibataire, a opté pour le domaine publicitaire qu’il a entamé à l’Alba, et poursuivi à Londres, avec un Master en Graphic Design de la LCC, et un MBA Corporate IE à Madrid. Actuellement, il est à Toronto.
Un héros ou un homme idéal, dans votre vie?
Sur le plan local, j’apprécie vivement la personnalité du président Camille Chamoun, qui est un meneur. J’aime également la personnalité du Amid Raymond Eddé, son honnêteté… Sur le plan international, je citerai le général Charles de Gaulle. Il disait: «Gouverner, c’est prévoir»…
Comment pourrait-on combattre la corruption au Liban, d’après vous?
J’ai été le premier à dire que la lutte anti-corruption va de haut en bas, comme on procède au nettoyage des escaliers. C’est une opération en continu.
8, 9 et 13 Septembre 2016. Congrès de la Ligue sur le thème: «Les réfugiés syriens… la voie du retour», qui a eu de larges échos au niveau national. Le président de la Ligue maronite Antoine Klimos a été le premier à lancer l’appel à faire face à la migration des Syriens au Liban.
Avocat, bâtonnier de l’Ordre des avocats de Beyrouth, président de la Ligue maronite, président-fondateur du cabinet Klimos & Associés… Quelle période a été la plus riche pour vous?
La période la plus riche a été celle de mon mandat en tant que bâtonnier de l’Ordre des avocats. Elle m’a permis de prôner la défense des libertés et m’a donné le courage de dire tout haut les choses telles qu’elles sont. Comme en 1997, à titre d’exemple lorsque j’ai annoncé une grève générale de trois jours pour protester contre le décret gouvernemental interdisant les manifestations et l’arrêt d’étudiants et d’activistes qui réclamaient la diffusion «interdite» d’une interview avec le général Michel Aoun. Le Premier ministre Rafik Hariri m’a demandé si je renonçais à la grève au cas où il libèrerait les détenus. J’ai rétorqué: «Je défends la liberté de croyance et d’expression, non une personne concernée. Le décret d’interdiction des manifestations est anticonstitutionnel. Renoncer à la grève dépendra de l’annulation de l’interdiction de manifester».
Vous avez été membre de l’Ordre des avocats avant de devenir bâtonnier. Parlez-nous-en…
En 1987, et pour la première fois, j’ai été élu membre de l’Ordre des avocats, suivi de deux autres mandats successifs. Durant cette période, je me suis tenu à l’écart des plaidoiries relevant de mon cabinet, pour ne pas exploiter mon poste à des fins personnelles.
En 2016, vous avez été élu président de la Ligue maronite… De quelles réalisations êtes-vous le plus fier?
J’ai été élu président de la Ligue maronite à l’unanimité et je suis fier de toutes mes réalisations à la tête de la Ligue. Lors de l’élection du nouveau Conseil exécutif, le 19 mars 2016, j’ai annoncé le thème de mon mandat: Réaliser le plan de renaissance et d’enracinement dans le sol natal.
Le 19 octobre 2016, après les bombardements de la région de Qaa, dans la Békaa, une campagne de levée de fonds a été menée par la Ligue pour soutenir la région et les fils des martyrs. Onze enfants orphelins ont bénéficié des recettes. Propos recueillis par Marcelle Nadim
Quels sont vos hobbies? Le sport, notamment le foot et le basket, depuis mon enfance.
Votre livre préféré? L’homme, cet inconnu d’Alexis Carrel.
Votre auteur préféré? Amin Maalouf.
Votre meilleur film? Gone with the Wind.
Votre rêve? La santé pour tous, le succès pour mes enfants, et cette joie indescriptible de vivre entouré de ma famille.
Votre citation préférée? Alexandre Dumas diait: «Il y a des services rendus tellement grand qu’ils ne sont payables que par l’ingratitude».
Les secrets de la réussite? L’ambition, l’excellence…
Votre meilleur souvenir d’enfance? Les beaux moments passés dans le jardin de la maison familiale à Achrafieh. Fils du maire de Rmeil, Eid Klimos, je passais la plupart de mon temps dans ce lieu verdoyant qui jouxte le jardin des Jésuites.